Rencontre avec le Dr Florence HUT, Directrice médicale
« La prise en charge pluridisciplinaire des patients est essentielle »
Face à la diminution des durées d’hospitalisation et au vieillissement de la population, les hôpitaux s’adaptent, réfléchissent à de nouvelles approches et font évoluer leurs pratiques. Florence Hut, directrice médicale de notre institution, partage sa vision du CHwapi de demain dont les projets sont déjà sur les rails aujourd’hui.
- Docteur Hut, comment voyez-vous l’avenir des soins hospitaliers ?
« Je pense que l’hôpital ne prodiguera plus que les soins trop compliqués pour être organisés à la maison, ceux qui font intervenir beaucoup de personnes simultanément autour du patient. Depuis trente ans, l’évolution vers une prise en charge de plus en plus ambulatoire est constante. Aujourd’hui, en France, des équipes effectuent déjà des poses de prothèses en one-day. Au CHwapi, la durée moyenne d’hospitalisation est actuellement de 4 jours, tous patients confondus.
A partir du moment où l’hôpital devient un endroit de passage, nous devons travailler sur l’avant et l’après. L’avant, c’est la prévention, la coordination avec les médecins traitants, la préparation à l’hospitalisation, l’éducation des patients, etc. Et l’après, c’est le développement et l’intensification du suivi du patient à la maison ainsi que la coordination avec les familles, les pharmaciens, les médecins traitants, etc. Dans cette optique, nous avons mis en place le dépistage de la dénutrition pour les personnes âgées hospitalisées ainsi qu’un suivi diététique après le retour à la maison. C’est un exemple parmi d’autres.
La place de l’hôpital évolue. Ma ligne directrice, c’est l’ouverture, c’est l’hôpital hors des murs ».
- Ce n’est pas un hasard si vous évoquez ce dépistage pour les seniors. Dès votre arrivée à la direction médicale du CHwapi, vous avez en effet souhaité développer le projet « CHwapi, ami des aînés ». Le vieillissement de la population constitue-t-il un autre facteur déterminant pour penser l’hôpital de demain ?
« Le vieillissement constitue effectivement un des défis majeurs pour l’hôpital qui doit réfléchir à la meilleure façon d’intégrer les aînés dans ses initiatives. Au CHwapi, plus de 50% des patients sont des personnes de plus de 65 ans.
Pour développer le projet « CHwapi ami des aînés », j’avais d’abord besoin de connaître les besoins des seniors tournaisiens, d’en apprendre plus sur leur vision du CHwapi, les choses qui, selon eux, devaient être améliorées, etc. J’ai donc pris contact avec la Ville de Tournai et j’ai pu assister à plusieurs reprises au conseil consultatif des aînés. Parmi leurs demandes, figurait la création d’un carnet d’informations. Nous avons travaillé avec eux pour établir le contenu : accès au CHwapi, numéros utiles, carnet de suivi, démarches avant et après une hospitalisation, informations sur le traitement, etc. Ce carnet des aînés sera disponible prochainement pour toutes les personnes de plus de 65 ans.
Plus globalement, le projet « CHwapi ami des aînés » implique qu’au sein de chaque discipline médicale et paramédicale, une réflexion soit menée pour développer un projet spécifique de service ciblé sur les aînés. Par exemple des consultations ciblées sur les troubles érectiles en urologie, des dépistages de la baisse de la vision en ophtalmologie ou de la surdité en ORL mais aussi des projets d’éducation aux familles sur diverses thématiques comme la démence. Nous travaillons beaucoup sur la prévention ». D’autres concrétisations sont déjà programmées : mise en place d’un appartement thérapeutique, création d’un espace snoezelen, développement de la balnéothérapie, aménagement du patio, etc ».
- L’hôpital a-t-il aussi un rôle à jouer pour aider les seniors à rester à domicile ?
« Depuis le Covid, on constate que les aînés rechignent de plus en plus à quitter leur logement pour partir en maison de retraite. Mais rester à domicile se prépare. C’est la raison pour laquelle nous développons un projet de réadaptation gériatrique. Le but ? Faire en sorte que lorsqu’ils quittent l’hôpital, les patients soient capables de garder leur autonomie. Sur le Site unique, nous créerons un appartement thérapeutique où les patients seront mis en situation. On y mènera tout un travail de prévention, notamment au niveau des chutes. Actuellement, des ergothérapeutes font déjà des visites à domicile pour aider et conseiller la famille dans l’optique d’un retour.
Le projet de réadaptation concerne des patients hospitalisés qui doivent retrouver leur autonomie mais nous comptons aussi développer des programmes sur admission. Cela signifie que durant un séjour défini, et sur base d’objectifs, nous accueillerons des patients âgés pour les réadapter. Ce projet sera également mené sur le Site unique ».
- La prolongation de la durée de vie amène-t-elle à développer les prises en charge pluridisciplinaires ?
« Cette pluridisciplinarité est essentielle à mes yeux ! Pour qu’une personne soit bien soignée, tout le monde doit être autour d’elle. La transversalité doit être opérationnelle à tous les niveaux et réfléchie par l’ensemble des médecins, infirmiers, paramédicaux. Pour moi, c’est la seule philosophie qui réponde aux besoins des patients, qui appréhende la personne et les soins dans leur globalité. Et cette interdisciplinarité passe aussi par la prise en compte de l’avis des patients et leur famille ».